L’acide polylactique (PLA), le matériau de base

De nombreux matériaux thermoplastiques sont désormais disponibles pour l’impression 3D FDM. Le PLA (acide polylactique) constitue, avec l’ABS (acrylonitrile-butadiène-styrène), l’un des deux matériaux de base. Usuellement, les utilisateurs débutent avec le PLA, réputé plus facile à imprimer.

Le cycle de vie du PLA

L’acide polylactique (PLA, polylactic acid), est un homopolymère d’acide lactique. Il s’agit en réalité d’un polymère de type polyester (figure). Le PLA est un bioplastique [1] compostable.

Le PLA peut être biosourcé, obtenu à partir de maïs essentiellement. D’autres agro ressources sont possibles, par exemple la mélasse de canne à sucre. L’acide lactique produit par fermentation lactique de la biomasse est ensuite polymérisé en PLA selon différentes modalités, certaines passant par un dimère cyclique appelé lactide.

Le PLA ne présente pas de dangers physiques (c’est-à-dire liées aux propriétés physico-chimiques), toxiques ou écotoxiques au sens règlementaire. Ses chaînes longues en font une macromolécule qui ne répond pas aux critères de classification des substances dangereuses. Les fiches de données de sécurité mentionnent essentiellement le risque de d’irritation des yeux, des voies respiratoire et de la peau lié aux particules de poussière s’il s’en formait. Concernant les dangers physiques, le PLA est, comme la majorité des produits organiques, considéré incompatible avec les oxydants puissants.

À l’autre extrémité du cycle de vie, la biodégradation [2] du PLA se produit dans les conditions particulières du compostage industriel en conditions contrôlées de température, d’humidité et de présence de micro-organismes. Elle intervient difficilement dans le milieu naturel. Des produits innovants pourraient cependant permettre dans un avenir proche une biodégradabilité dans les composts domestiques.

La gestion des déchets de PLA issus de l’impression 3D doit inclure le caractère actuellement non recyclable. En effet, les filières de recyclage des déchets plastiques permettent difficilement de différencier le PLA des autres matériaux plastique, en particulier le PET, polyéthylène téréphtalate, et la contamination de ces matières par du PLA compromet leur recyclage.

Voir aussi : Impression 3D et risques chimiques

Les dangers limités du PLA

L’acide L-lactique [3], monomère du PLA lorsqu’il est issu de la fermentation lactique, ne figure pas dans l’annexe VI du règlement (CE) n°1272/2008. Les classes de danger de cet acide et son étiquetage ne sont donc pas harmonisés au niveau européen. Les dangers notifiés règlementairement dans l’inventaire des classifications et étiquetages, géré par l’agence européenne des produits chimiques (ECHA) concernent l’irritation cutanée, les dommages irréversibles pour les yeux et parfois l’irritation des voies respiratoires. Il s’agit de dangers usuellement constatés avec des acides organiques.

Les filaments de PLA peuvent également, selon leur procédé de fabrication, contenir du lactide, dimère cyclique de l’acide lactique. Cette substance, dont la dénomination chimique est 3,6-Dimethyl-1,4-dioxan-2,5-dione, ne figure pas non plus dans la liste des substances dont la classification et l’étiquetage sont harmonisés au niveau européen. Les notifications de dangers du L-lactide concernent essentiellement l’irritation oculaire.

Le monomère d’acide lactique, et le lactide résiduels dans le PLA ne semblent donc pas constituer un danger extrêmement préoccupant dans les conditions habituelles d’utilisation du PLA durant le process d’impression 3D FDM.

La polymérisation fait intervenir un catalyseur

La polymérisation du lactide en acide polylactique fait intervenir de l’octanoate d’étain en tant que catalyseur. Il s’agit de l’isomère 2-éthylhexanoate d’étain (numéro CAS 301-10-0). Certaines FDS mentionnent dans leur rubrique 3 (Composition/information sur les composants), la présence de ce catalyseur résiduel à hauteur de moins de 200 ppm soit 0,02 % en masse (soit 20 mg de catalyseur pour 100 g de polymère).

Le 2-éthylhexanoate d’étain ne figure pas dans l’annexe VI du règlement CLP. Cependant, il a fait l’objet de dossiers d’enregistrement REACH et les résultats d’un certain nombre d’études ont été fournis à cette occasion aux autorités européennes. La substance, conformément à la règlementation, fait l’objet de notifications de classification et d’étiquetage par les fournisseurs. Ainsi, la plupart des notifiants considèrent le 2-éthylhexanoate d’étain comme une substance irritante pour la peau et les yeux, et sensibilisante pour la peau.

Certains notifiants le classent également comme toxique pour la reproduction de catégorie 2 (substances suspectées, sur la base d’études chez l’animal mais sans évidence de la pertinence de ces études chez l’homme). La substance ne possède pas une tension de vapeur importante à 25 °C (0.3 Pa), ce qui l’exclut des substances considérées comme COV [4]). Cependant la tension de vapeur dépend fortement de la température.

En conséquence, il ne peut être exclu qu’au cours de l’extrusion (autour de 200 °C), des molécules de 2-éthyl hexanoate d’étain soient libérées dans l’atmosphère, certes en quantité extrêmement faible.

Émissions de particules et de composés organiques volatiles pendant l’impression

Il existe quelques travaux concernant les émissions de composés organiques volatiles et de particules ultrafines durant le processus d’impression 3D.

On entend par particules ultrafines des particules de diamètre inférieur à 0,1 µm, susceptibles de passer la barrière alvéolo-capillaire [5]. Les vitesses d’émission au cours de l’impression sont très variables selon les imprimantes, la forme de l’objet imprimé, les températures de la buse et du plateau et la durée d’impression. Dans les conditions d’une étude récente [6], le PLA figure parmi les polymères dont la vitesse d’émission de particules est la plus faible quels que soient la marque et le modèle de l’imprimante. La vitesse médiane d’émission est de l’ordre de 108 particules par minute. Le PLA chargé de particules de bois ou de particules minérales [7] émet des particules à une vitesse comparable au PLA non chargé.

La même étude a porté sur l’analyse des COV principaux émis lors de l’impression. Elle montre que le COV majoritairement émis lors de l’impression du PLA est sans surprise le lactide, substance de départ du polymère, émis à une vitesse de 4 à 5 µg/min. Cette vitesse est relativement faible par comparaison aux vitesses d’émission à partir de filaments ABS ou nylon. Les concentrations finales en COV et particules fines dans le local d’impression dépendent du volume de ce dernier et du renouvellement de l’air.

Attention aux additifs

Enfin, il convient de considérer le PLA utilisé en impression 3D FDM comme un mélange polymère-additifs. En effet, le PLA est en général chargé en pigments de natures diverses, organiques ou inorganiques. Certains filaments particuliers sont chargés de particules (de bois, de métal, de carbone) dans des proportions pouvant aller jusqu’à 40 % en masse. Il existe également des PLA spéciaux, contenant des substances thermosensibles (qui changent de couleur selon la température de l’objet), phosphorescentes (qui émettent de la lumière), photosensibles (qui changent de couleur sous UV), conductif (incluant du carbone).

Même lorsque ces substances sont en proportions faibles, elles sont néanmoins présentes dans le matériau, et susceptibles, le cas échéant, d’être émises durant le process. Elles participent ainsi, suivant leur nature, à la formation de particules ultrafines et/ou de COV. Les informations concernant ces substances sont difficilement accessibles, les fiches de données de sécurité sont peu informatives concernant ces additifs. Il est donc difficile d’estimer l’éventualité de relargage de ces substances au cours du process et d’en évaluer la dangerosité.

En conséquence, et même si le PLA est considéré comme le polymère dont la mise en œuvre pose le moins de préoccupations, il est préférable d’appliquer des mesures générales de prévention. En particulier il est préférable de choisir les filaments les mieux renseignés, par exemple par l’existence d’une FDS conforme. La ventilation pendant et après l’impression ne devrait pas être négligée. Par ailleurs, compte tenu de la présence éventuelle d’additifs, et hors revendication étayée par une autorisation règlementaire, les filaments de PLA ne permettent pas de réaliser des objets aptes au contact alimentaire.

Conditionnement des matériaux thermoplastiques

Les filaments destinés à l’impression 3D sont en général livrés en conditionnement hermétiquement filmé et il est recommandé de les conserver à l’abri de l’humidité. Usuellement, un sachet de dessiccant est présent à l’intérieur de l’emballage. En général, il s’agit de silica gel contenu dans un sachet scellé en papier poreux…
En savoir plus : Conditionnement des matériaux thermoplastiques pour l’impression 3D : le dessiccant


En savoir plus : Impression 3D et risques chimiques | Conditionnement des matériaux thermoplastiques pour l’impression 3D : le dessiccant

[1] Le terme bioplastique regroupe deux types de polymères :
– des polymères issus de sources renouvelables (polymères biosourcés) ;
– des polymères biodégradables.
En conséquence, un bioplastique peut être biosourcé et non biodégradable, biosourcé et biodégradable, ou issu de ressources fossiles (souvent pétrochimique) et néanmoins biodégradable. Les bioplastiques ne doivent pas être confondus avec les plastiques biocompatibles, qui ont la propriété de ne pas pas interférer avec les milieux biologiques dans lesquels ils sont employés (utilisés par exemple pour des prothèses, des matériels médicaux,…)

[2] La norme européenne EN 13432, relative à la directive Emballages et déchets d’emballages (94/62/CE), définit les plastiques dégradable. Elle spécifie les exigences et les méthodes permettant de déterminer la possibilité de compostage et de traitement en anaérobiose des emballages et des matériaux d’emballage. Selon cette norme, le matériau :
– doit être transformé à 90 % en humus en six mois lorsqu’il est placé dans des conditions de compostage industriel ;
– est compostable s’il satisfait à un test de 12 semaines, à la fin duquel 90 % de la masse de résidus doit traverser un tamis de 2 mm de côté ;
– se transforme en résidus qui ne présentent pas d’écotoxicité et dont la concentration en métaux lourds est très faible ;
– se transforme en résidus qui ne produisent pas d’inhibition de la croissance des plantes sur le milieu (biodégradable) ou le compost (compostable).

Cette norme est donc définie uniquement pour les conditions agressives d’une unité de compostage industriel, c’est à dire fonctionnant à une température supérieure à 60 °C entre autre. Ces plastiques ne se dégradent donc pas forcément dans un composteur domestique, et a fortiori dans l’océan. Par ailleurs il n’existe à ce jour aucune norme applicable aux conditions de compostage domestique.

[3] Numéro CAS 79-33-4 ; synonymes : l-(+)-lactic acid, (2S)-2- Hydroxypropanoic acid, Propanoic acid, 2-hydroxy-, (2S)-

[4] COV : Composé organique volatil. Selon la Directive 1999/13/CE, un COV est « tout composé organique ayant une pression de vapeur de 0,01 kPa ou plus à une température de 293,15 K (soit 25 °C ndlr) ou ayant une volatilité correspondante dans les conditions d’utilisation particulières. »

[5] La barrière alvéolo-capillaire sert aux transferts gazeux entre le sang et les alvéoles pulmonaires. Les substances susceptibles de la franchir sont donc capables de présenter des effets systémiques, par distribution via la circulation sanguine.

[6] Parham Azimi, Dan Zhao, Claire Pouzet, Neil E. Crain, and Brent Stephens (2016). Emissions of Ultrafine Particles and Volatile Organic Compounds from Commercially Available Desktop Three-Dimensional Printers with Multiple Filaments, Environ. Sci. Technol., 50, 1260–1268.

[7] concernant les particules minérales, le polymère n’est pas clairement identifié dans l’étude comme du PLA, mais il est identifié comme tel par les fournisseurs de tels filaments.